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Témoignage inspirant d’un enseignant passionné

Pour marquer ce début d’année scolaire, nous vous invitons à découvrir le témoignage d’Éric Cornellier, un enseignant du primaire qui œuvre au sein de notre Centre et qui cumule plus de 35 années d’expérience. Éric nous partage pourquoi il a autant à cœur son métier, dans ce texte publié dans Le Devoir, le 23 août dernier.


La magie du premier jour de l’année scolaire, et de tous les autres aussi

Par Éric Cornellier, enseignant au primaire et père de trois enfants devenus grands

Témoignage inspirant d’un enseignant passionné

Au mois de juin dernier, je terminais ma 35e année d’enseignement au primaire. J’aurais pu, à ce moment, choisir de prendre ma retraite. Toutefois, ce n’est pas ce que j’ai fait. J’ai plutôt choisi de continuer à enseigner. J’ai fait ce choix pour différentes raisons qui me tiennent à cœur. Et je souhaiterais les exprimer ici, car je crois qu’elles sont de nature à mieux faire connaître et apprécier ce beau métier qui est le mien.

Enseigner au primaire, c’est d’abord rester en contact direct avec les enfants. Cela est précieux et riche d’enseignements. On entend souvent dire que les enfants d’aujourd’hui sont plus difficiles à éduquer que ceux d’avant. Cela est peut-être vrai en partie, mais ne témoigne pas pleinement de la réalité. Pour être juste, il faut nuancer
quelque peu cette assertion et lui apporter quelques précisions.

Dans une de ses plus belles chansons, Paul Piché nous dit : « Pis les enfants, c’est pas vraiment, vraiment méchants. Ça peut mal faire, mal faire de temps en temps. Ça peut cracher, ça peut mentir, ça peut voler. Au fond, ça peut faire tout ce qu’on leur apprend. »

Oui, c’est bien ça : les enfants peuvent faire tout ce qu’on leur apprend. C’est donc à nous – enseignants, enseignantes, parents et autres éducateurs ou éducatrices – de leur apprendre de grandes et belles choses, de leur apprendre à aimer ce qui mérite de l’être et à éviter les comportements et les erreurs de jugement qui rapetissent la vie ou qui l’empêchent de s’épanouir.

Pour ma part, mon expérience d’enseignant m’a appris que, dans la mesure où l’on sait porter une attention bienveillante à leur égard, les enfants sont source d’un émerveillement continuel.

Bien sûr, dans une classe le rôle de l’enseignant est d’enseigner les différentes disciplines scolaires et celui des élèves de les apprendre. Je ne remets pas cela en question. Cependant, j’affirme du même souffle que, chaque jour, mes élèves me font aussi réaliser des apprentissages importants et font de moi un meilleur enseignant et une meilleure personne. Cela il faut le dire, car les enfants apportent beaucoup à ceux et à celles qui travaillent de bon cœur avec eux, et ce, dans le but de les aider à grandir et à devenir des personnes responsables.

Comme Sisyphe

Certes, dans le travail de l’enseignant, les répétitions sont nombreuses et parfois lourdes. Vous connaissez Sisyphe ? Cet homme légendaire qui – selon la tradition grecque – a été condamné par les dieux à pousser une grosse pierre au sommet d’un montagne. Et cette pierre, en vertu du décret des dieux, finit toujours par retomber au bas de la montagne; tout est alors à recommencer, indéfiniment.

Néanmoins, comme l’a si justement dit le philosophe Albert Camus en se référant à ce mythe : « On retrouve toujours son fardeau. Mais Sisyphe enseigne la fidélité supérieure qui nie les dieux et soulève les rochers. […] La lutte elle-même vers les sommets suffit à remplir un coeur d’homme. Il faut imaginer Sisyphe heureux. »

Enseignant depuis plus de trois décennies, je me sens heureux comme le Sisyphe de Camus. Quand arrive les derniers jours du mois d’août, j’ai hâte de retourner à l’école et de retrouver mes élèves. J’anticipe avec bonheur la magie toujours neuve du premier jour d’école; l’émotion alors ressentie : ce mélange de joie, de gêne, de crainte et d’espérance qui nous envahit de part et d’autre.

J’anticipe aussi avec plaisir tous ces moments forts de l’année scolaire. Ces activités spéciales organisées par les membres de l’équipe-école et qui ont lieu au rythme des saisons.

Sans oublier l’essentiel, qui consiste à faire découvrir à mes élèves, par le biais des apprentissages réalisés au quotidien et la qualité des échanges vécus en classe, la satisfaction profonde, solide et vraie que l’on peut éprouver à pratiquer et à affiner sa maîtrise des différents savoirs scolaires.

Ces savoirs qui ont le pouvoir de nous rendre plus libres et maîtres de nos destinées. Ces savoirs qui, au fond, nous donnent accès à des richesses qui ne s’achètent pas, mais qui valent plus que toutes les autres.